lundi 28 septembre 2009

La masterisation et l'UBS : où en est-on ?

L'assemblée générale d'aujourd'hui a été l'occasion de faire un point sur le projet de réforme dit de "masterisation" et ses conséquences.

Qu'est-ce que la "masterisation "?

Il y a un an, un projet de réforme du recrutement et de la formation du personnel enseignant a commencé à se mettre en place.

Ce projet postulait que pour devenir professeur (Professeur des écoles ou Professeur des lycées et collèges) il faudrait désormais être titulaire d'un master (bac +5), et non plus d'une licence comme jusqu'alors (bac+3).=> d'où le nom de « masterisation »

Ce projet impliquait aussi une modification de la formation des enseignants ; après l'obtention du concours, la première année d'enseignement était une année de formation alternant enseignement dans une classe et formation au métier (assurée par l'IUFM), rémunérée.

Dans le projet de réforme, cette année de formation en alternance disparaissait. On envoyait de nouveaux enseignants sur le terrain sans aucune formation pratique.

Face à ce projet de réforme (associé à d'autres), un mouvement de protestation national dans les universités s'est mis en place, en particulier à Lorient, dès le début 2009.


Du projet au mouvement...

  • 22 janvier, première coordination nationale des universités : appel à la grève totale de l'université dès le 2 février si le projet de masterisation (entre autres) n'est pas retiré.
  • 3 février, une première assemblée générale à Lorient ne se déclare pas en grève, mais soutient le mouvement de contestation ponctuellement.
  • 26 février assemblée générale au centre ville : elle décide de mettre en place une occupation de l'université par ses usagers/personnels sur un mode pédagogique : il s'agit de faire des débats et de l'information le centre de la contestation universitaire à Lorient.

Jusque fin mai, une « nouvelle vie universitaire » commence à Lorient, animée par les étudiants et leurs enseignants. Durant cette période, scandée par des AG hebdomadaires, diverses actions ont été organisées, à la fois sur le thème de la sauvegarde du service public d'enseignement en France, et sur un mode « calme et obstiné ». Ainsi des cours alternatifs (ouverts à tout le monde, dans et hors les murs de l'université) ont été organisés, ainsi que des actions plus inattendues (mais toujours en privilégiant l'information du public) (baignade dans une mer gelée avec slogans), le tout ponctué de plusieurs manifestations « traditionnelles ».

A travers ces actions, la communauté universitaire engagée de Lorient a constamment montré son attachement au service public d'enseignement ainsi que sa responsabilité et a contribué à enfin faire apparaître Lorient sur la carte des campus universitaires français.



Etat des lieux...

Malgré cet important mouvement de mobilisation (le plus étendu dans le temps depuis longtemps dans le milieu universitaire), le gouvernement n'a pas reculé dans la mise en place de cette réforme, à part sur quelques points de détails (la mise en place de mesures transitoires pour l'année 2009-2010 par exemple): l'esprit reste le même. L'esprit reste aussi le même dans les moyens de la mise en oeuvre :aucune concertation avec les interlocuteurs du monde universitaire. Ainsi les derniers décrets mettant en place la réforme ont paru durant l'été.

Ces décrets sanctionnent bel et bien l'idée de masterisation :

En effet, pourront se présenter à la session 2011 du CAPES ou du CRPE les étudiants inscrits en master 2. Ils passeront ainsi la même année un examen pour l'obtention du diplôme et un concours de recrutement de la fonction publique. L'idée de stage est de nouveau à l'ordre du jour : les étudiants, toujours en master 2, auront un « stage en responsabilité » à effectuer, c'est-à-dire qu'ils seront amenés à donner des cours sans avoir ni diplôme ni concours...

Cette cinquième année d'études après le bac s'annonce donc très difficile, puisqu'il s'agit de préparer deux épreuves différentes (parmi lesquelles le concours, qui demande une quantité de travail considérable), tout en menant un stage et, ne l'oublions pas pour 50% des étudiants, tout en travaillant pour financer ces études. Autant donc exclure directement tous les étudiants qui ont besoin de se salarier.

Cela est d'autant plus vrai que la durée d'études augmente considérablement : en effet, bien que le cas soit prévu par cette réforme, les étudiants qui pourront obtenir le concours l'année même du master seront bien rares au vu de la double somme de travail exigée. Dans les faits la préparation du concours prendra donc place, le plus souvent, après l'obtention du M2, ce qui amène en réalité à passer le concours 6 années après le bac. (contre 4 aujourd'hui).

Cette réforme installe donc bien une sélection sociale inavouée pour le recrutement des professeurs de l'éducation nationale, ce qui est une remise en cause élémentaire des valeurs républicaines.

Un autre problème est posé par l'exigence conjointe comme conditions de recrutement d'un concours et d'un diplôme : en effet, étant donné la présence de deux épreuves différentes, il est tout à fait envisageable d'être reçu à l'une des deux seulement ; or il est indispensable d'être en possession des deux pour être recruté comme enseignant titulaire. C'est là qu'on comprend la logique gouvernementale : tous les titulaires d'un master qui seront collés au concours (mais avec un niveau d'étude à bac + 5 - ou 6) seront en effet une source importante d'enseignants non-titulaires, c'est à dire coûtant moins cher, embauchés par les rectorats sur des contrats précaires.

Enfin, après l'obtention du concours, la notion de stage rémunéré fait sa réapparition dans les décrets. Seulement toute mention d'IUFM a été supprimée. Les nouveaux professeurs devront donc acquérir une formation pratique, mais personne ne sait ni ni comment !


Calendrier

  • un texte ministériel de cadrage des maquettes des masters enseignement est attendu pour le mois de décembre (2009)
  • la remontée des nouvelles maquettes par les universités devrait se faire au printemps 2010 (mi-avril)


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