mercredi 25 mars 2009

Xavier Darcos dans le texte: ou pourquoi le recul sur la "masterisation" n'en est pas un

Analyse de la lettre de Xavier Darcos du 20 mars 2009.
Certaines de ces analyses sont directement reprises de l'article de SLU :

Monsieur le secrétaire Général
20 mars 2009

Analyse
M. le secrétaire Général = Gérard Aschieri, Secrétaire Général de la FSU
Etonnant qu’un tel courrier soit envoyé au SG d’un seul syndicat
20 mars 2009 = lendemain d’un jour de manifestations considérables + date théorique de remise des maquettes de plus en plus proche (31 mars). Il y a déjà eu 2 reports (15.12.2008 et 15.02.2009), et même la CPU a reconnu l’impossibilité de mettre en œuvre cette réforme dès l’année 2009-2010
Le jour où Valérie Pecresse reçoit des syndicats du Supérieur pour la recherche, Xavier Darcos (re)prend la main… la lettre n’est même pas co-signée !

Texte de Xavier Darcos
Vous avez souhaité obtenir des précisions sur la façon dont la réforme du recrutement et de la formation des enseignants va se mettre en place de façon définitive en 2010-2011

Analyse
des précisions : on peut parler ici d’euphémisme ; X Darcos parle de « précisions » là où d’autres évoquent plutôt « report, moratoire, abrogation » de l’ensemble de la réforme…

de façon définitive : l’adjectif apparaît deux fois, ce qui met un terme de fait à la négociation et annonce dès l’avant-propos la mise en place de la masterisation.
Le recrutement des enseignants se fera bien sur la base d’un master dès l'année prochaine.
Au lieu d’un report pur et simple de la réforme des concours et de la formation des enseignants, X. Darcos propose un montage en deux temps :
  • 1er temps : rentrée 2009 : « mastérisation » de la formation des enseignants mais avec maintien des concours actuels au printemps 2010 : le contenu et les dates du concours ne changent pas (encore que le mardi 24 mars sur France Inter Xavier Darcos, s’emmêlant dans les dates, nous ait finalement annoncé un concours en octobre 2009 !) mais il faudra pour devenir enseignants être titulaires d’un M2
  • 2ème temps : réforme du concours de recrutement reportée à 2011.

Conclusion : Partout les medias annoncent « Xavier Darcos renonce » : mais ce n’est pas du tout cela… bien au contraire. SLU parle très joliment de « poker menteur »…

Texte de Xavier Darcos
1/ En vue de la mise en place définitive de la réforme, je vous fais connaître mon accord pour qu’une discussion soit ouverte dans les plus brefs délais sur les places respectives de l’admissibilité et de l’admission aux concours pendant l’année de M2, afin de permettre de concilier au mieux la préparation des concours avec une formation universitaire disciplinaire adossée à la recherche et une formation professionnelle s’articulant autour de stages.

Analyse
A nouveau : « mise en place définitive »
« discussion soit ouverte » : avec qui, quand et comment ???
L’objet de cette "discussion" est explicite : « les places de l’admissibilité et de l’admission aux concours durant l’année de M2 » : autrement dit, les dates des épreuves écrites et orales des concours. Mais la discussion semble en réalité close par avance pour deux raisons :
• La possibilité de mise en place du point 2 dépend d’une date précoce du concours en M2 (voir plus bas)
• Sur France Inter, le 24 mars, X Darcos a annoncé un concours en octobre de l’année de M2.

On remarque donc que dès 2009-2010, les conditions d’accès aux concours auront changé : actuellement, seule la licence est obligatoire pour les concours de PE et le CAPES (les décrets seraient de toutes façons impossibles à modifier en temps utile).
Cela a aussi pour conséquence de devoir introduire, dès l’année 2009-2010, une formation universitaire spécifique : or les maquettes, impossibles à réaliser correctement, ne sont pas déposées et ne le seront pas dans les délais utiles.


Texte de Xavier Darcos
2/ Les stages rémunérés en responsabilité des étudiants mis en place pendant l’année de M2 serviront à enrichir l’offre d’enseignement en établissement et à développer la formation continue, notamment des jeunes enseignants dans les premières années d’exercice. Ces stages ne seront pas utilisés pour couvrir des besoins en remplacement de personnels en congé ou des besoins permanents d’enseignement.

Analyse
Problème de la définition des « stages rémunérés en responsabilité » : théoriquement, un stage en « responsabilité » est réservé à ceux qui ont déjà un concours… Quand on parle d’un « stage en responsabilité », cela signifie qu’on a une classe en face de soi (sans forcément d’enseignant au fond de la salle) ; cela oriente vers l’idée que le concours serait situé très tôt dans l’année de M2 (et que seuls les étudiants qui l’ont obtenu suivraient ensuite ces stages en responsabilité) : doit-on rappeler que la date des concours dans l’année est pourtant l’unique objet possible de discussion annoncé dans cette lettre ?
Le « rémunéré » est sans doute là pour rendre la chose attractive. Remarquons dès à présent que seuls les stages « en responsabilité » seraient rémunérés (il n’est en aucun cas fait mention des stages dits de « pratique accompagnée » (voir point 10).

Autre problème : n’y a-t-il pas une contradiction entre : des stages censés « enrichir l’offre d’enseignement en établissement » et qui « ne seront pas utilisés pour couvrir des besoins en remplacement » ? ou alors, pour résoudre la contradiction, il faut entendre qu’on proposera aux étudiants de M2 des cours « hors des emplois du temps habituels » comme les PPRE (Projets Personnels de Réussite Encadrés) pour le secondaire ou soutien pour le primaire (que les PE pour certains de plus en plus nombreux ne veulent plus assurer- autrement dit des « cours » qui n’en sont pas vraiment)
Ne s’agirait-il pas également de limiter les fameuses heures supplémentaires défiscalisées (auxquelles on a largement eu recours cette année dans plusieurs académies) ? N’oublions pas que la réforme du lycée (semestrialisation…) n’est que reportée.

Pour faire des économies de tous les côtés, le ministère propose que des étudiants en M2 fassent des stages pour remplacer les enseignants dans leurs premières années d’exercice après le concours : c’est le sens de : « développer la formation continue, notamment des jeunes enseignants dans les premières années d’exercice ».
Ces stages remplacent ainsi une véritable année de formation au métier d’enseignant. La rémunération d’un travail d’enseignant doit être liée à un recrutement et à un statut ; un stage fait partie d’une formation, incluant enseignements, stages en responsabilité ou en situation, suivi par des formateurs.

Le nombre de stages rémunérés n’est pas précisé.
Pour le nombre de stages, il faut sans doute aller se reporter au précédent texte de Vaélrie Pécresse et Xavier Darcos qui disait :
« Les stages en responsabilité, qui pourront bénéficier à 50.000 étudiants, [on rappelle qu’en 2008, il y avait 175.000 inscrits aux différents concours] feront l’objet d’une rémunération de 3.000 € pour 108 heures d’activité. [Attention ! Dans le courrier du 20 mars, on ne parle plus d’heures d’activité rémunérée, mais uniquement de stages en responsabilité (dont la durée n’est pas précisée dans le volume total de 108 heures)] - Enfin, 5.000 postes d’assistants d’éducation seront réservés aux étudiants de M2 inscrits aux concours de recrutement et 4.000 postes seront réservés aux étudiants souhaitant se destiner au métier d’enseignant inscrits en M1 »

Mais s’il s’agit de réserver ces stages aux lauréats des concours (d’où l’emploi de l’expression « en responsabilité ») les épreuves devraient dès lors être placées très tôt dans le calendrier, pour que les résultats soient connus avant le début des stages (avec une incertitude, jusqu’aux résultats, sur le nombre de stages à prévoir par académie), et il faudrait ensuite offrir un cursus de M2 commun à une double population d’étudiants : ceux qui auraient réussi le concours et les autres.

Le problème sera surtout crucial pour les CAPES, CPE, CAPLP, COP car le nombre de lauréats par académie est imprévisible.
Conclusion : il n’y a pas véritablement d’espace de négociation : seul le mois du concours est ouvertement proposé à la discussion alors qu’en réalité, pour que le dispositif des stages puisse ne serait-ce que techniquement fonctionner, il est contraint. L’année de M2 reste donc particulièrement problématique.

Texte de Xavier Darcos
3 / Je vous confirme que dès la rentrée universitaire 2009, un dispositif d’accompagnement social visant à garantir la démocratisation du recrutement sera mis en place, de manière complémentaire aux aides sur critères sociaux déjà existantes dans l’Enseignement supérieur. Dans ce cadre une réflexion sera ouverte sur les modalités de la contribution du dispositif des AED à cet accompagnement social.

Analyse
La question de l’allongement de la durée des études non rémunérées n’est absolument pas réglée. Ce « dispositif d’accompagnement » (non chiffré) ne peut pas compenser la perte d’une année rémunérée dans le cursus des jeunes enseignants, qui devront, après la licence, financer une année d’étude supplémentaire.

Les postes d’AED (Assistant d’éducation) sont aussi une perte de temps pour l’étudiant qui veut préparer sérieusement un concours très sélectif. Les étudiants aux revenus modestes seraient ainsi doublement pénalisés par la réforme :
• une année de plus à financer
• éventuellement ce financement passera par un poste d’AED qui handicapera leur préparation.

On peut d’ailleurs rappeler les textes sur les assistants d’éducation :
« Les assistants d’éducation pourront être recrutés à temps complet ou à temps incomplet. L’organisation du travail sera adaptée à leurs besoins comme à ceux des établissements. Leur temps de travail annualisé correspondra à 1600 h pour un plein temps, comme dans le reste de la fonction publique. Pour permettre aux jeunes de concilier leurs fonctions d’assistants d’éducation et leurs études universitaires ou leur formation professionnelle, un crédit d’heures, pouvant aller jusqu’à 200 h pour un plein temps, pourra être attribué par l’employeur. Enfin, le travail à mi-temps devra être encouragé pour les étudiants, afin de les aider ».

À la rentrée 2003, 16 000 postes d’assistant d’éducation avaient été créés. Il n’est pas annoncé de nouvelles créations de postes. Les assistants d’éducation sont recrutés sur temps complet (35h /semaine) ou temps incomplet. Les assistants d’éducation sont rémunérés à l’indice 283 , soit environ 9,23 euros/heure.

On rappelle encore que 175000 étudiants étaient inscrits aux différents concours en 2008.

« complémentaire aux aides sur critères sociaux » peut aussi être à comprendre comme aide sur critère de mérite : cela figurait dans la lettre précédente : « Dès la rentrée universitaire 2009, un dispositif social nouveau au profit des étudiants qui se destinent à devenir enseignants sera créé, de manière additionnelle à ceux existants déjà dans les universités.- 12.000 bourses, pouvant atteindre 2500 euros et calculées en fonction du revenu fiscal de référence, seront attribuées sur critères académiques pour l’année de M2 aux meilleurs étudiants de M1 »

Texte de Xavier Darcos
4/ Pendant l’année de fonctionnaire stagiaire, à partir de la rentrée 2010, une partie des obligations de service, de l’ordre d’un tiers, sera consacrée à une formation continuée renforcée permettant la mise en place d’un tutorat et de retours réguliers en formation universitaire, à visée disciplinaire ou professionnelle

Analyse
Le « fonctionnaire stagiaire » est l’enseignant qui vient d’obtenir son M2 et est lauréat du concours. Tout fonctionnaire est dit « stagiaire » avant sa titularisation : on joue ici sur les mots, suggérant l’existence durant cette année de "stages", mais il n’en est rien.
« De l’ordre de » : on peut repérer l’approximation d’une lettre censée apporter des précisions ; soyons clair : environ deux tiers des obligations de service d’un professeur seront consacrés à l’enseignement soit environ 12 heures d’enseignement en secondaire et 18 heures en primaire.
Or, à l’heure actuelle, pour les tout jeunes collègues (appelés PE2 pour les PE et PLC2 pour les certifiés) la situation est très différente : un PE2 fait une série de stages durant cette année, dont un stage « filé » un jour par semaine, et un PLC2 a un stage en responsabilité devant une classe à l’année (au maximum 9h par semaine) et suit un stage de « pratique accompagnée », le reste de leurs services étant affecté à leur formation professionnelle et disciplinaire. Leur faire exercer devant élèves les « deux tiers » de leur service est donc une régression, dictée seulement par une recherche de diminution des coûts de formation.

Les questions que soulève ce passage du texte :
dans la mesure où le fonctionnaire stagiaire sera obligatoirement titulaire d’un M2, que sera la « formation universitaire » qu’il doit recevoir ?

Qui fera les heures de cours de ces jeunes collègues partis en formation continue ? La réponse figurait sans doute dans le point 2 : les étudiants de M2. Par conséquent, auront droit aux stages en M2 (en « responsabilité ») le nombre d’étudiants qui correspond au nombre de reçus au concours l'année antérieure ; les autres étudiants soit n’auront pas de stages, soit assureront des cours de soutien. Encore faut-il notamment pour les PLC que les stagiaires et les enseignants soient dans les mêmes académies (ce qui n’est bien sûr pas le cas, et l’on retrouve là le problème insoluble des stages en cours de Master)
La lettre évite de dire ce qui est réellement : une augmentation de la charge d’enseignement dans l’année suivant la réussite au concours (peut-on alors parler réellement d’année de "stage" ?), au détriment de la formation en alternance en IUFM dont on peut s’étonner qu’ils aient totalement disparu du dispositif de formation (alors qu’ils sont censés être intégrés dans les universités et non y disparaître)

Flou sur le contenu de la formation de l'année de stagiaire : qui, où, quoi ? qu’est-ce qu’une «formation universitaire, à visée disciplinaire ou professionnelle » ?
Les Universités récupèrent-elles aussi la formation continue des enseignants ?

Texte de Xavier Darcos
5/ Les formateurs universitaires responsables de la formation des étudiants au métier d’enseignant participeront à la validation des stages en lien avec les tuteurs et, dans le premier degré, les professeurs des écoles maîtres formateurs. Ils veilleront à la bonne insertion de ces stages dans le cadre des masters et travailleront en partenariat avec les écoles et les établissements scolaires. Les universités seront invitées à coordonner et structurer de façon cohérente l’action de ces formateurs.

Analyse
Cela suppose à nouveau que tous les étudiants pourraient bénéficier de stages, ce qui est loin d’être garanti.
Si les stages sont obligatoires pour valider le M2 et que le M2 est obligatoire pour être admis aux concours, alors il y a là un goulet d’étranglement qui introduit une différence de traitement inacceptable entre les candidats.
Qui sont les « formateurs universitaires » ?


Contrairement à la situation actuelle, il ne serait plus possible de passer les concours en candidat libre.

Le travail de mise en stage est très lourd administrativement, il demande une collaboration compliquée avec les services de l’Inspection académique.
Quid également des « tuteurs » ? Seront-ils rémunérés ces collègues du secondaire qui accueilleront des stagiaires dans leur classe ? Puisqu’il s’agit pour les M2 de stages en responsabilité, ces étudiants interviendront dans les classes de tout jeunes collègues juste sortis du concours. Conclusion : soit le M2 a pour « tuteur » un stagiaire, soit les tuteurs interviennent dans des classes qui ne sont pas les leurs.

Rappelons également le nombre énorme de stagiaires potentiels de M ! Les établissements proches des lieux de formation universitaire ne pourront pas accueillir tous les stagiaires (surtout si tous les étudiants ont leur stage durant la même période … encore la question du calendrier !!!)
Conséquence : on peut donc envisager un étudiant de M2 à l’Université de Bretagne Sud-Lorient et en stage(s) dans un collège des Côtes d’Armor (rappelons que 108 heures, c’est 6 semaines à temps complet et donc 12 semaines à mi-temps). Cet étudiant pourrait ( ???) aussi, parallèlement, être assistant d’éducation à Ploërmel...


Il faut aussi penser aux cycles et aux niveaux. Dans le premier degré : pour apprendre, un PE doit pouvoir aller en maternelle, au cycle 2 (CP et CE1) et au cycle 3. Pour les PLC, il faut aller en lycée et en collège (distances, difficultés géographiques, implantations variées, rurales, urbaines...) : comment insérer tout ce dispositif dans l’année de préparation du concours ? Qui fera ce travail ?
Le texte du ministre pose également un problème statutaire : dans la mesure où les concours sont maintenus dans leur forme actuelle pour 2010, comment peut-on, sur cette base, ne pas offrir à ceux qui les réussiront (PE2, PLC2, PLP2) les mêmes conditions de stage que celles qui prévalent actuellement ? Les décrets (décrets inter-ministériels de 1972 pour les PLC et de 1990 pour les PE) et les textes règlementaires seront -ils modifiés ?


Enfin, on peut noter le silence à propos de l’enseignement privé (participera-t-il à l’offre de stage pour les étudiants qui prépareraient le CAFEP ou le concours de PE) ?

Texte de Xavier Darcos
6/ La mastérisation s’accompagnera de l’ouverture de négociations sur la revalorisation des enseignants, CPE et CO Psy. Celle-ci portera sur des mesures pour les jeunes enseignants recrutés à compter de la session 2010 ainsi que sur des mesures couvrant l’ensemble des catégories d’enseignants.

Analyse
Cette revalorisation annoncée (mais non chiffrée !!) ne doit pas faire oublier que la réforme de la formation des enseignants signifie la perte d’une année de cotisation et le financement d’une année supplémentaire de formation.
Le remboursement des prêts étudiants actuellement envisagés par les députés de la majorité viendra encore grever le budget du jeune enseignant.

Rien n’est dit par ailleurs sur la revalorisation de l’ensemble des enseignants des premier et second degré : ne faudra-t-il pas, comme lors de la création du statut de professeur des écoles, proposer à tous les enseignants en poste un accès à la nouvelle échelle de rémunération ? Rappelons que les enseignants qui ont passé les concours dans les dernières années ont – en fait déjà – un niveau d’études bac + 5 (une année de préparation aux concours + une année de formation professionnelle et disciplinaire).

Texte de Xavier Darcos
7/ Par ailleurs sera également abordé le sujet des conditions d’accès aux concours des non-titulaires pour leur recrutement à titre définitif.

Analyse
L’intention affichée est louable mais rien n’est précisé : concours adaptés ? Dispense du master ? Conditions d’accès à la titularisation ? Sur quel statut ? La question est d’autant plus cruciale que le système envisagé, qui génèrera un grand nombre de « reçus-collés » (étudiants échouant aux concours mais titulaires du Master), va favoriser le recrutement de non-titulaires, y compris par des établissements privés en concurrence directe avec l’enseignement public.

Ce processus de casse du statut des enseignants (des premier et second degrés), couplé avec la facilitation du recrutement de précaires (notamment par la création de l’ANR bis = Agence Nationale de Remplacement) n’est en rien “reporté”.

Texte de Xavier Darcos
8/ Pourront s’inscrire aux concours de la session 2010 : · Les étudiants déjà titulaires d’un master ou inscrits en M2. Pour ces candidats, le recrutement du fonctionnaire stagiaire pour la rentrée 2010 sera subordonné à l’obtention effective d’un master.

Analyse
Il faut signaler d'emblée une difficulté : que se passera-t-il au cas où un étudiant réussirait le concours et échouerait au master ? La pression sur les jurys des masters va être très forte dans ce cas, et il sera difficile de ne pas entériner la décision du jury de concours.
A l’inverse, on pourrait aussi avoir une multiplication d’étudiants collés au concours mais titualires d’un M2 « métier de la formation », ces « reçus-collés » formeront une armée de vacataires taillables et corvéables à merci au point que le maintien même de l'existence d'un concours national (malgré la promesse finale du ministre) pourrait à terme être remise en cause : pourquoi payer l'organisation de concours nationaux puisque de très nombreux étudiants seront titulaires d'un "master de l'enseignement et de la formation"?
La seule formule qui ne présente pas ces deux dangers symétriques serait un dispositif destiné à reconnaître par un master, a posteriori, le niveau bac + 5 des titulaires d’un concours.

Concrètement et pour 2010 :
Les titulaires d’un M2 (à la rentrée 2009) qui auront le concours en 2010 n’auront AUCUNE formation professionnelle. Ils auront eu un M2 recherche ; ils seront stagiaires à la rentrée 2010 mais n’auront JAMAIS suivi de stages : on va donc mettre dans les classes, à la rentrée 2010, (à 2/3 de l’horaire statutaire) des stagiaires qui n’auront JAMAIS vu un élève.


Texte de Xavier Darcos
A titre exceptionnel et dérogatoire, pour la seule session 2010 des concours :
- pourront se présenter aux concours de la session 2010 et être admis pour la rentrée scolaire 2010, sans conditions nouvelles de diplômes, les candidats présents aux épreuves d’admissibilité de la session 2009 ;
- pourront également se présenter aux concours de la session 2010, les étudiants inscrits en M1 à la rentrée universitaire 2009. En cas de réussite à un concours de la session 2010, le bénéfice du concours leur sera garanti pendant un an. Ils seront recrutés comme enseignants stagiaires pour la rentrée scolaire 2011 sous réserve de l’obtention de leur M2 à l’issue de l’année universitaire 2010-2011. Ces étudiants bénéficieront pendant cette année des stages en responsabilité ainsi que des différents dispositifs d’aide prévus pour les étudiants de M2.

Analyse
Il s’agit ici des modalités d'organisation de la fameuse année dite de "transition" :

Tous les candidats présents aux épreuves de l’écrit des concours cette année pourront se présenter au concours l’année prochaine et être reçus quel que soit leur diplôme (L ou M)

Les actuels étudiants de L3 pourront passer l’année prochaine le concours ; mais s’il l’obtiennent, ils ne seront fonctionnaires stagiaires qu’en 2011 s’ils ont obtenu, en 2010-2011, un master 2.
Disons-le encore : tous les actuels L3 ne pourront être réellement enseignants qu’avec un M2 ; autrement dit, l’annonce selon laquelle la réforme des concours est reportée d'un an est totalement fausse !


Plus généralement, ces conditions supposent que les masters d’enseignement et de formation existent dès la rentrée 2009. Or, pour le moment, la quasi-totalité des universités s’est prononcée contre la remontée au ministère des maquettes de masters, notamment parce que là encore, on nous demande de bâtir des maquettes préparant à un concours dont on ignore encore le contenu.

Si l’on suivait le raisonnement du ministère, on aurait à la rentrée 2009 :
  • Des M1 qui préparent à la formation du concours tel qu’il existe aujourd’hui et existera encore l'année prochaine (pour les étudiants de L3 actuels)
  • Et qui devraient conduire en 2010 à un M2 sans préparation au concours (puisque les étudiants l’auront eu en M1) : on n’ose imaginer ce qui arriverait à ces étudiants, lauréats du concours, qui échouerait au master et perdraient ainsi le bénéfice du CAPES ou du CRPE alloué pour un an
  • Des M2 qui préparent à la formation du concours tel qu’il existe aujourd’hui (pour les étudiants titulaires d’un M1)
  • Des M1 qui préparent à la formation du concours « nouvelle version » qui sera passé en M2 et dont à l'heure actuelle, on ignore toujours le contenu.
  • Sans parler de la formation des collègues qui seront reçus cette année au concours et seront fonctionnaires stagiaires à la rentrée 2009….

On mesure l’opacité totale de l’offre de formation des universités l’an prochain et la quasi impossibilité de leur mise en place.

Texte de Xavier Darcos
9/ Afin de permettre l’adaptation progressive de l’appareil universitaire de formation, les concours seront maintenus dans leur état actuel pour la session 2010. La réflexion sur la rénovation des concours de la session 2011 devra s’engager rapidement. C’est dans ce cadre que seront également examinés les ajustements pour certaines disciplines professionnelles de l’enseignement professionnel.


Analyse
Nous avons vu comment cette annonce d’un maintien des concours dans leur état actuel en 2010 était en réalité biaisée. L’effet d’annonce a cependant bien fonctionné (même le Canard Enchaîné daté du 25 mars annonce que Xavier Darcos "a battu en retraite").

A nouveau, en signalant que "la réflexion sur la rénovation des concours de la session 2011 devrait s'engager rapidement", on nous demande de bâtir des formations préparant à un concours dont on ignore le contenu !

Texte de Xavier Darcos
10/ Les étudiants préparant les concours, dans les différents parcours organisés par les universités bénéficieront dès la rentrée 2009 de l’offre de stages de 108 heures, que ce soit en pratique accompagnée ou en responsabilité afin de préparer leur professionnalisation progressive.

Analyse
Là on voit se révéler la supercherie : il n’y aura pas de stage pour tout le monde !

On rappelle que dans le précédent texte on trouvait : "Les stages en responsabilité, qui pourront bénéficier à 50.000 étudiants, feront l’objet d’une rémunération de 3.000 € pour 108 heures d’activité."
MAIS : en 2008, le nombre de candidats inscrits aux concours externes était très exactement de 174 895 (98 175 pour les concours du secondaire et 76 720 pour le primaire). Il suffit de faire un petit calcul...

De plus, le stage n’a pas à être une "offre". Le stage est un droit, c’est une modalité de la formation.


Texte de Xavier Darcos
Je tiens enfin à rappeler solennellement que le principe du recrutement par concours nationaux est bien évidemment un principe intangible et que les candidats à la fonction de professeur ou de CPE continueront à être recrutés à travers les différents types de concours actuellement existants. En outre, je vous confirme que pour la session 2010, le nombre des places aux concours externes du 1er comme du 2nd degré sera au moins égal à celui des concours 2009.

Analyse
L'affirmation du maintien des concours nationaux est évidemment une excellente nouvelle, mais l'absence d'engagement sur une date n'engage justement à rien.
Par ailleurs, vu le nombre croissant de départs en retraite, il n’y a rien d’exceptionnel à ce que le nombre de postes mis au concours soit maintenu. Il devrait en réalité augmenter significativement pour maintenir le potentiel de formation des établissements soit maintenu au niveau actuel.

On peut également supposer, via la précision "pour la session 2010" qu’en 2011, il y aura une baisse drastique des postes ; surtout il y aura une année quasi « blanche » en termes de recrutement en 2010-2011 puisque les étudiants qui auront eu le concours mais ne seront pas titulaires d’un M2 seront justement encore étudiants en M2. Pour les PE c’est sans doute du quasi 100% !

Conclusion :

« Un moratoire sur la forme qui maintient le fond de la réforme ne peut être considéré comme une réponse satisfaisante, moins encore comme un recul. Nous ne saurions échanger le maintien provisoire du concours en l’état contre la mise en application subreptice d’une réforme que nous rejetons en bloc ». cf. SLU 21 mars 2009




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